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JEAN-LUC HÉRIDEL, LE HANDICAP 
ET SON COMBAT POUR L’AUTONOMIE

Infirme moteur cérébral de naissance, Jean-Luc Héridel « aurait dû » être placé à vie dans une institution spécialisée. Refusant cette fatalité sociale, il s’est battu pour son droit à l’autonomie et celui des personnes handicapées en général. A 55 ans, il vit avec son épouse, valide, dans leur maison, près de Lorient. Inapte au travail, il anime une émission sur la radio Plum’FM et tient un blog. Parcours d’une vie en mouvement. 



A droite, Jean-Luc Héridel au micro de Plum' FM où il officie en tant qu'animateur.

Ce mercredi après-midi, Jean-Luc Héridel attend l’appel du manager de Zoufris Maracas. Le groupe doit se produire le week-end suivant à la fête de l’humanité Bretagne, à Lorient, et Jean-Luc a prévu une interview pour l’émission qu’il anime chaque premier vendredi du mois sur la radio associative Plum’ Fm. Jean-Luc aime ce contact avec les artistes. « Avec eux, j’ai l’impression que le handicap n’existe pas ! »

 

Être un individu à part entière. S’épanouir même en situation de handicap moteur profond. Pas si évident dans une société qui « ghettoïse » un peu trop facilement ses « populations différentes ». C’est pourtant le combat que Jean-Luc Héridel, né « infirme moteur cérébral » en 1957 en région parisienne, a mené toute sa vie.

 « Ma destinée était toute tracée, je devais prendre perpét’ dans une structure spécialisée. » De fait, dès l’âge de 4 ans, Jean-Luc est placé en institution. Mais l’adolescence, l’agitation politique des années 70 et des rencontres avec certains éducateurs militants vont éveiller un désir d’autonomie qui se fait de plus en plus ressentir.

Candidat à la présidentielle de 1981

 

Première étape, il s’installe à Sarcelles (Val d’Oise) dans un foyer-appartement, nouveau dans le genre. « On pouvait y recevoir qui et quand on voulait… Enfin, en théorie ! ». Cette première désillusion n’empêche pas Jean-Luc de goûter à une semi-liberté et à une vraie vie de quartier qui vont le conduire à des années de militantisme. « Je rêvais de changer une société qui me handicapait plus que mon propre handicap ! », raconte-t-il.

À l’époque, il descend donc dans la rue aux côtés du mouvement « Handicapés méchants », coréalise un film-témoignage « Ames charitables s’abstenir », lance le journal « Bankalement vôtre » et présente même sa candidature à la présidentielle de 1981. « 1981, c’était aussi l’année internationale des personnes handicapées. On a voulu être représentés et que soient posés les vrais problèmes : non-accessibilité des transports en communs, trottoirs non adaptés, exploitation dans les centres d’aide par le travail ou atelier protégé ! » Évidemment, il n’obtient pas les 500 candidatures, mais de tous les candidats officiels, au moins une, Huguette Bouchardeau (PSU), lui ouvre une tribune à tous ses meetings. 

 

C’est aussi au début des années 80 que Jean-Luc décide de quitter Paris pour Lorient, alors ville pilote dans le domaine de l’intégration des personnes handicapées (accessibilité, transports, logements). Il s’y installe avec Evelyne, une valide rencontrée sur un passage piéton de Sarcelles. L’amour, ça aussi, c’était inespéré. « Dès le plus jeune âge, on vous conforte dans l’idée que ce n’est pas pour vous, alors… »


​Jean-Luc Héridel vit avec sa femme "valide" à proximité de Lorient (photo : S. Biju)


Former un couple à part entière

 

30 ans plus tard, Jean-Luc et Evelyne vivent toujours ensemble, mariés, dans une jolie maison qu’ils ont fait construire dans la campagne lorientaise. « Mais sommes-nous vraiment reconnus comme un couple à part entière ? », s’interroge Jean-Luc, qui, inapte au travail, est selon la législation considéré comme dépendant de la personne avec qui il vit. 

Aujourd’hui, son Allocation adulte handicapé lui est attribuée en fonction des revenus d’Evelyne, aide-soignante. « Quelle belle conception du couple ! Il ne faut pas s’étonner si certains couples mixtes, handicapés/valide, vivent cachés ou clandestinement pour ne pas voir leur AAH diminuée voire supprimée. » 

La prestation compensatrice du handicap (PCH) lui permet par ailleurs d’avoir une auxiliaire de vie, 4 à 5 heures par jour chez lui et des aides pour l’aménagement de la maison, l’achat de son fauteuil. « Il vaut 16 000 euros et ce n’est pas le plus cher. La Sécu en rembourse 75%, pour le reste, à toi de pleurer un peu partout. »


Féru de chanson française, il anime un blog qui met en avant des artistes méconnus.​


Une autonomie physique et psychique

 

À 55 ans, Jean-Luc Héridel est moins militant qu’avant. Il n’en continue pas moins de porter un regard critique sur la prise en charge des personnes handicapées en France et estime le combat vers une meilleure autonomie toujours d’actualité. 

« Les discours vont dans ce sens, mais est-ce ça se fait vraiment ? En réalité, les dossiers sont de plus en compliqués à remplir… Dans les institutions, par manque de temps et d’effectifs, on n’est plus dans l’assistance que dans l’apprentissage de l’autonomie.  Un apprentissage qui ne devrait d’ailleurs pas être seulement physique, mais aussi psychique. Aujourd’hui encore, dès le plus jeune âge, tu n’existes qu’en tant qu’handicapé et pas en être humain. »

Jean-Luc, lui, s’y refuse encore et toujours !  « Improductif », c’est dans la vie culturelle et associative qu’il s’investit et s’épanouit. En plus de la radio, il assouvit sa passion pour la chanson française dans un blog, « La lettre aux Z’enchantées ». Sur les ondes ou sur la toile, il met en avant« des artistes qui ont du mal à se faire connaître ou reconnaître ». Une passion qui, en 25 ans, lui a offert de belles rencontres : Juliette, Olivia Ruiz, Anis… Des rencontres à tomber par terre comme un jour avec Jean Ferrat. « Pour lui, heureusement que j’étais assis ! »

Stéphanie Biju

 

 


LE CANARD SOCIAL 4 RUE DES CADENIERS  44000 NANTES 
T/02 28 08 72 25

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